Durant la semaine du 03 au 07 Juin 2013, les commissions constituantes de l’Assemblée Nationale Constituante se sont réunies pour donner leurs avis au sujet du projet final de constitution présenté par le comité mixte de coordination et de rédaction.
Commençant par la commission du préambule, des dispositions générales et de la révision de la constitution, les deux axes principaux ont été la question de la liberté de conscience et les dispositions transitoires. Il n’y a pas eu de divergences au niveau de l’ensemble des travaux de la commission. Concernant, la liberté de conscience, les élus du bloc Nahdha ont exprimé leur réserve quant à ce droit, non pas en tant que droit en tant que tel, mais en tant que danger qu’il pourrait entraîner en terme de dérives, comme par exemple les dérives relatives aux atteintes aux bonnes mœurs. Sahbi Atig a déclaré qu’il était bien d’insérer cette liberté au sein de la constitution, dans le sens où il faut protéger le plus de libertés, et que de toutes les façons, si cette liberté est étrange à la culture Tunisienne, le peuple la refusera par la pratique. Les élus Maya Jeribi et Issam Chebbi ont considéré à leur tour que l’insertion de ce droit était nécessaire et qu’il n’y avait pas de peur à avoir au niveau des dérives. Dans l’ensemble, le débat est allé assez rapidement, avec quelques petites discussions de formulations, mais dans l’ensemble, les membres de la commission étaient d’accord.
Le deuxième axe est celui des dispositions transitoires. Ces dispositions ont été proposées à cette commission alors qu’elle n’a pas planché dessus au départ. Habib Khedher est intervenu pour présenter ces dispositions et les membres de la commission les ont par la suite discuté en se mettant tous d’accord sur la nécessité de simplifier la formulation de ses articles et ont même proposé la création d’une commission qui s’occupera des dispositions transitoires, au mieux avant le dépôt du projet de la constitution au bureau d’ordre. Ils se sont mis d’accord pour informer le président de l’assemblée afin de trouver une solution à ses dispositions dans les plus brefs délais.
Quant à la commission des droits et libertés, au début de la réunion, Salma Baccar et Selma Mabrouk ont pris la parole pour exprimer leur opposition au projet final de constitution et l’intervention du comité mixte sur le fond, avant de quitter la salle.
De même, au sein de cette commission le débat était assez fluide avec quelques points soulevés concernant la formulation de certains articles et un accord de la part de la majorité concernant le projet proposé.
La discussion s’est attardée essentiellement sur deux dispositions différentes, à savoir le droit à la grève et les droits des femmes dans l’optique de protection de tous ses acquis d’une façon générale et la lutte contre la violence à son encontre.
Les réserves exprimées quant au droit à la grève sont relatives aux abus qui peuvent avoir lieu et la possibilité d’entraver le bon fonctionnement de plusieurs secteurs, s’appuyant sur l’expérience actuelle post-révolution avec le taux élevé de grèves et de sit-in. L’élu Mohamed Khila avait rassuré ses collègues en affirmant qu’il faut rester positif et que la compréhension de certains du droit à la grève est faussée par la situation actuelle exceptionnelle, et qu’avec la constitution, ça sera plus organisé et mieux limité par la loi.
Arrivant au point des acquis de la femme dans leur globalité, la présidente de la commission a expliqué que cette formulation a été choisie finalement pour éviter de limiter justement le champ de ses acquis, et ceci en réponse à l’élue Souhir Dardouri qui avait demandé la référence au CSP.
Il est nécessaire de mentionner qu’au niveau de l’article 48, l’élue Mounira Omri a exprimé ses réticences par rapport à l’emplacement de cet article unificateur du projet, mentionné en dernier lieu au sein de ce chapitre, qui délimite tous les droits et les libertés par la loi sans pour autant toucher au fond du droit ou de la liberté en question. Elle a demandé que cet article soit placé à la tête du chapitre, argumentant sa position par sa peur que tous les articles soient adoptés par la plénière et que ce dernier article ne le soit pas. C’est l’élu Mahmoud Gouiaa qui lui a répondu en affirmant qu’il y a des pratiques constitutionnelles précises et qu’il est inconcevable de commencer un chapitre, dans ce cas celui des droits et libertés, par les cas de délimitation avant de mentionner le fond même du chapitre.
Du côté de la commission des juridictions judiciaires, administratives, financières et constitutionnelles, il y avait une tension au début concernant les prérogatives du comité mixte de coordination et de rédaction et un débat houleux entre les membres de la commission et Fadhel Moussa, président de la commission et membre du comité mixte ayant exprimé son opposition au projet final le jour de l’annonce de son achèvement, qui avait insisté sur le fait qu’il a dit dès le début que sa participation au comité mixte ne signifiait pas son approbation sur tout ce qui émanerait de ce comité.
Concernant les différents organes juridictionnels, le débat s’est concentré sur la cour constitutionnelle, sa composition et ses prérogatives, avec un accord sur tout ce qui a été prévu pour les juridictions administratives et financières. L’élu Selim Ben Abdessalem a considéré qu’il vaudrait mieux avoir une cour constitutionnelle constituée de juristes. Par rapport à l’expérience, il a affirmé que 20 ans est une bonne durée pour avoir des candidats qui n’aspirent pas à avoir d’autres postes et soient, de ce fait, détachés quant à leur avenir professionnel.
Au sein de la commission des instances constitutionnelles, un accord a été exprimé par la majorité des présents concernant le projet avec une discussion relativement longue quant aux dispositions transitoires et leur lien avec la mise en place des instances créées par le projet de constitution.
Cette commission a aussi auditionné la haute autorité indépendante de la communication audiovisuelle qui avait demandé à être écoutée concernant les articles 122 et 124 du projet de constitution. En effet, les membres de la HAICA ont exprimé leur opposition à la formulation mettant en place une instance qui contrôlerait tous les médias, y compris la presse écrite, et défendant l’idée que cet organe doit se limiter à la régulation de l’audiovisuel. La vice-présidente de l’ANC, Mahrzia Labidi était aussi présente à cette audition et a soutenu cette position en affirmant qu’il est inconcevable d’exercer un quelconque contrôle sur la presse écrite, rappelant que les seules voies d’expression pendant l’ère de la dictature étaient les différents supports journalistiques que les partis d’opposition utilisaient pour faire parvenir leurs positions. L’autre point aussi soulevé par la HAICA concernait le mode de désignation des prochains membres de l’instance qui, selon le projet de constitution, seraient désignés par le parlement du peuple, ce qui va à l’encontre du mode de désignation du décret-loi N°116 qui met en place la HAICA. Cette opposition est motivée par un souci d’une atteinte probable à l’indépendance de l’instance, vu que le parlement sera composé par des forces partisanes.Au sein de la commission des instances constitutionnelles, un accord a été exprimé par la majorité des présents concernant le projet avec une discussion relativement longue quant aux dispositions transitoires et leur lien avec la mise en place des instances créées par le projet de constitution.rganes juridictionnels, le débat s’est concentré sur la cour constitutionnelle, sa composition et ses prérogatives, avec un accord sur tout ce qui a été prévu pour les juridictions administratives et financières. L’élu Selim Ben Abdessalem a considéré qu’il vaudrait mieux avoir une cour constitutionnelle constituée de juristes. Par rapport à l’expérience, il a affirmé que 20 ans est une bonne durée pour avoir des candidats qui n’aspirent pas à avoir d’autres postes et soient, de ce fait, détachés quant à leur avenir professionnel.
Finalement, c’est au tour de la commission des collectivités publiques, régionales et locales d’émettre son avis quant au projet final de constitution préparé par le comité mixte. Cette commission est particulièrement consensuelle et a examiné deux points essentiellement : Concernant l’article 138, la majorité était d’accord avec le changement de formulation stipulant que le Conseil des collectivités locales est une instance représentative des Conseils régionaux dont le siège est en dehors de la capitale, pour éviter tout favoritisme envers les régions. Par contre, le fait de ne pas désigner le lieu dans la constitution soulèvera le même débat plus tard. Le deuxième point était relatif à la présence du président du conseil des collectivités locales lors des délibérations du parlement qui est devenue optionnelle. L’article 132, dans son point relatif au système fiscal des collectivités locales, a été aussi examiné plus longuement, et a été approuvé au final.
Rappelons que la commission des pouvoirs exécutif et législatif et de la relation entre eux n’a pas tenu de réunion suite à la lettre adressée par son président, Amor Chetoui, au président de l’ANC, refusant de réunir sa commission en signe d’opposition au projet final de constitution, et considérant que la copie qu’il a reçu n’est pas l’authentique. Les membres de la commission ont reçu le Jeudi 06 Juin un SMS de la part du bureau de l’ANC pour tenir une réunion le lendemain Vendredi 07 Juin, chose qui ne s’est pas produite puisque Amor Chetoui a interrompu la réunion avec les membres de la commission qui le soutiennent, à savoir Ikbel Msadaa, Samia Abbou, Fatma Gharbi, Ali Bechrifa et Ahmed Essefi. Il y a eu une tension énorme dans la salle et des accusations entre les deux camps, surtout suite à la confiscation du cahier de notes de Salha Ben Aicha, rapporteur de la commission, par Amor Chetoui. Deux points de presse ont été séparément organisés par Amor Chetoui et ses collègues d’un côté, et le bloc d’Ennahdha d’un autre côté.